Spécial krach
février 2009
Lettre à ma fille
Aggravation de la crise bancaire
Hier, les banques ont à nouveau communiqué leurs désastreux résultats, pour le quatrième trimestre 2008. En France l’ancien secteur mutualiste paie une nouvelle fois son entrée dans l’univers capitaliste. Natixis a par exemple accumulé toutes les erreurs : subprimes, Madoff, prises de risques excessives. Elle entraîne dans sa débâcle les banques populaires et les caisses d’épargne. Pour améliorer la situation, l’état force une fusion entre ces champions des pertes, pour masquer ses erreurs. En effet au lieu de laisser des commissaires au comptes effectuer un travail de surveillance, l’Etat les a supprimés (par une loi de finances), en nommant ses hommes habiles à gérer une carrière, mais incompétents pour gérer des banques. La banque d’Ecosse a annoncé hier 27 milliards d’euros de pertes. Comme les banques américaines, ont vu une croissance des défaillances de 50% au dernier trimestre 2008, le panorama n’est guère réjouissant. Toute l’année 2009 sera marquée par de nouvelles mauvaises surprises de par une protection néfaste apportée par la norme IAS 39 qui offre la possibilité d’étaler les pertes sur plusieurs exercices.
http://boursitude.over-blog.com/article-27659386.html
Vous êtes nombreux à vous interroger sur le rôle des autorités de régulation et leurs pouvoirs dans la crise actuelle. L’affaire Madoff offre la possibilité aux juristes des journaux financiers de donner des conseils afin de permettre la récupération des fonds volatilisés.
Ailleurs l’herbe est plus verte !
Le libéralisme a donné des ailes à l’imagination financière. Le prochain danger qui nous attend est l’extension de l’Europe aux anciens pays de l’Est qui ont tout appris en finance des américains. Or ces pays qui n’ont pas intégré l’euro ni véritablement approuvé une Europe intégrée, ont bénéficié d’énormes investissements originaires de l’Europe de l’Ouest. La crise en cours aura d’importants effets néfastes sur les banques qui en 2009/2010 cumuleront les effets de la crise avec les décrochages monétaires de ces pays qui diminueront la valeur de leurs créances.
Ce qui est en cause c’est la possibilité offerte aux particuliers d’aller prendre des risques sur des marchés étrangers. Dans ces conditions la prise de risque a été maximale, car on expatrie ses capitaux pour les faire gérer depuis les Etats-Unis, dans divers paradis fiscaux. La complexité même de ces montages où le gestionnaire français place au Luxembourg des capitaux gérés dans des fonds communs étasuniens ne peut qu’inspirer la méfiance. Certaines victimes ne se plaindront même pas de la volatilisation de leurs économies blanchies à l’essoreuse.
La Poste a perdu 70 millions dans ses participations dans la banque Lehman. C’est qu’elle était incapable d’offrir le rendement attendu par ses clients en France. De nombreux gestionnaires ont renoncé à gérer lorsque les comparaisons de performances étaient meilleures ailleurs. Les directions des banques n’ont que faire de bons gestionnaires nationaux si la comparaison leur est défavorable. Cette démission a d’énormes conséquences pour la France dont le taux d’épargne des ménages est élevé. Les placements off-shore améliorent une performance de court terme et non de long terme.
Ainsi les investissements réalisés aux Etats-Unis et en Grande Bretagne se sont tous avérés désastreux sur longue période. Les rapports de change très favorables à la zone euro s’ajoutent à la dépréciation des marchés mondiaux. On cumule alors -30 et – 40% de la dépréciation sur le change avec les – 60% de la régression des cours de bourse. Les paradis fiscaux sont en outre dérégulés et sans contrôle puisque c’est l’absence de contrôle qui intéresse les clients de ces officines.
Les autorités de régulations : L’AMF
L’autorité de régulation des marchés financiers est de création récente. Pour connaître ses attributions, ses pouvoirs il suffit d’aller sur le site de wikipedia, qui vous donnera toutes les informations utiles :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Autorit%C3%A9_des_march%C3%A9s_financiers_(France)
http://www.amf-france.org/
L’AMF a succédé à plusieurs organismes dont la COB. En ce qui concerne les introductions de nouvelles valeurs ou de mise sur le marché d’entreprises dénationalisées, voire de création de nouveaux organismes de placement collectifs, elle émet un avis sur les documents diffusés dans le public. Cet avis est souvent négatif en ce qu’il comporte des avertissements tenant aux risques présentés par la société. A cet égard ces avis sont de bon sens et plutôt mal suivis par les acquéreurs de titres.
Ils sont du type « société présente sur une nouveau marché, absence de bénéfice, risque de change ». Le cas le plus emblématique est celui d’EDF où en dehors d’un avertissement placé en tête de la brochure, près de 15 pages mentionnaient de nombreux risques liés au nucléaire : durée de vie des centrales, recyclage des déchets, sites et dépôts, risques pris sur des marchés étrangers, présence de l’autorité de sûreté nucléaire, risques présentés par l’uniformité des centrales. L’attention du public était attirée sur des générations de centrales de même conception ce qui conduit à devoir opérer des investissements sur l’ensemble des centrales de même type en cas de découvertes d’imperfection ou de risques nouveaux. Le prix excessif d’achat de centrales à l’étranger était aussi noté (en fait le prix était devenu élevé de par la variation des parités de change (Brésil, Argentine ?). Nous avons appris depuis que le contrôle de la radioactivité est réalisé par une filiale dépendant d’EDF et que les mesures effectuées ne reflètent pas la réalité de la diffusion de radioactivité autour des centrales ou des collecteurs se déversant en mer ou dans les fleuves.
La Cour de Comptes a eu aussi l’occasion de tancer EDF sur l’insuffisance des provisions mises en œuvre pour entretenir les sites où les déchets nucléaires sont enfouis. En fait ces sites doivent durer des centaines d’années sans que leur coût d’entretien soit prévu.
Dans ces divers cas, j’estime que la COB hier et l’AMF font bien leur travail. Tellement bien, que si vous demandez le document d’introduction d’une valeur ou d’un OPCVM, la banque vous le communiquera rarement ! Mais il suffit d’aller chercher l’information sur Internet soit sur le site de l’AMF, soit sur le site d’Euronext.
En ce qui concerne le contrôle des banques les investisseurs savent bien que chaque banque a créé de nouveaux compartiments à côté des dépôts de fonds des particuliers. Une banque prendra des risques avec un secteur de financement international, des prises de participations dans des entreprises, des compartiments d’émission de warrants et autres outils spéculatifs. Et là on parlera de risque de gestion qui est sous la responsabilité des organes dirigeants de chaque banque. La mauvaise gestion n’est pas contrôlée : c’est le marché qui évalue chaque institution en fonction des bénéfices réalisés et distribués. La véritable sanction d’une mauvaise gestion s’affirme par le renvoi des dirigeants fautifs.
Vers une autorité de contrôle Internationale ?
Les dérives qui sont à l’origine de la crise actuelle forceront les autorités à réagir. En tout premier lieu il faudra contrôler mieux ou supprimer tous les paradis fiscaux. Comme chaque pays possède un paradis fiscal différent proche de ses frontières il faudra agir contre ces concurrences déloyales. Mais ce sera d’autant plus difficile si cet Etat est reconnu au plan international. C’est ainsi que Monaco est une création fictive de la France pour le profit de ses nationaux. Monaco a acquis une influence grâce à des extensions territoriales accordées par la France. C’est ainsi que la télévision, la radio, les télécommunications de Monaco bénéficient de privilèges exorbitants accordés par la France. En effet tous les émetteurs de cette entité sont situés en territoire français. Ils incommodent d’ailleurs nombre de riverains excédés par de multiples abandons de souveraineté territoriale accordés par la France. La France impose diverses servitudes à ses nationaux destinées à faciliter les émissions hertziennes au profit d’un état étranger. Lorsque l’on voit les mobilisations qui rassemblent des riverains contre des antennes destinées au téléphone mobile on peut s’étonner de l’absence de mobilisation vis-à-vis des antennes monégasques. Or elles concentrent beaucoup plus de risques de par la puissance des émetteurs de téléphonie mobile, de radios et de télévision qui couvrent une large partie de l’Italie du Nord et du Sud de la France. La société Vivendi a rapidement compris l’ensemble des risques pris en vendant rapidement sa participation dans Monaco Télécom. Monaco est coincée entre la mer et la montagne. Elle peut s’étendre vers la mer sans aucune limite. En ce qui concerne le sol, elle ne peut pas s’étendre, y compris par rachat de terrains. La propriété d’un terrain limitrophe n’est pas extensif de souveraineté selon le droit international. C’est ainsi que si la Jordanie et l’Arabie Saoudite ont échangé des territoires limitrophes, un traité international a enregistré cette transaction. La France dispose donc d’instruments coercitifs pour obtenir un contrôle accru des institutions financières présentes à Monaco.
Nemo auditur propriam turpitudinem…
Il est possible de lutter contre la fraude fiscale. Chaque gouvernement peut contraindre ses nationaux. La volonté prouvée de vouloir échapper au fisc est fautive. Je citerai cet exemple :
Le fisc américain vient d’obliger la banque suisse UBS à fermer les comptes ouverts en dehors des Etats-Unis pour les résidents américains. Les clients qui voudront récupérer leur argent vont devoir se manifester.
Les problèmes n'en finissent plus pour UBS qui, après avoir pris des risques financiers insensés qui lui ont coûté une fortune lors de la crise du subprime, voit le fisc américain lui faire boire le calice dans une vaste affaire de fraude fiscale portant sur 18 milliards de dollars de revenus non déclarés aux Etats-Unis, soit une perte de recettes fiscales estimée à 300 millions de dollars par an.
La filiale d'UBS destinée à aider les riches Américains à contourner le fisc avait déjà annoncé, en juillet 2008, qu'elle arrêtait d'ouvrir de nouveaux comptes offshore (en dehors des Etats-Unis). Ensuite, à la fin 2008, sous la pression du fisc américain, la banque suisse avait commencé à révéler les noms de ses clients. On apprend maintenant que les 19 000 comptes offshore ouverts à des résidents américains sont en train d'être fermés.
La banque propose à ses anciens clients de leur rendre leur argent : soit en leur envoyant un chèque, soit en le transférant sur le compte d'une autre banque aux Etats-Unis ou à l'étranger. Ceux qui encaissent le chèque apporteront la preuve au fisc de leur comportement délictueux, ceux qui décident ne pas l'encaisser perdront tout. Ceux qui veulent le transférer sur un autre compte dans une banque étrangère doivent le déclarer au fisc américain, apportant eux aussi la preuve de leur fraude.
Quid des épargnants non fautifs ?
Ils devraient bénéficier de l’aide de l’Etat pour avoir acquitté normalement leurs impôts. Toutefois, jusqu’à ce jour tous les gouvernements ont refusé l’instauration d’une class-action, car les voleurs peuvent financer nos éminences grises. C’est ainsi que les rétro-commissions permettent de financer les politiques à partir des paradis fiscaux. Lorsque les politiques sont les amis de Monsieur Messier, l’épargnant doit compter sur les juges américains, pour obtenir sa condamnation et non sur les juges français. La future mainmise de l’Etat sur l’instruction poursuit cet objectif de supprimer l’essentiel du contentieux des affaires économiques. Seule la durée et l’étendue de la crise actuelle offrira la possibilité de montrer que si d’autres pays agissent fermement, nous devrions suivre leur exemple au lieu de nous en éloigner.
Guy Muller