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15 septembre 2008 1 15 /09 /septembre /2008 19:30

Spécial krach

septembre 2008

 

 

Comme l’an dernier à la même époque j’accélère le rythme de parution. Alors que les banques étaient atteintes par la crise et requinquées par les Etats respectifs, ce jour nous avons connu une montée des risques, puisque 3 nouveaux établissements sont mis en cause. La FED ne peut plus soutenir le système. La banque Lehman (600 milliards de dollars d’actifs), a été mise en faillite. Merrill Lynch a été achetée pour 50 milliards de dollars, tandis que AIG un des grands assureurs américain serait en défaillance. Aussitôt les banques et plusieurs sociétés ont communiqué sur leur degré d’engagement (Dexia, SEB, BNP,UBS). Toutefois là n’est pas le problème. Les faillites imposent la vente d’importantes lignes d’actions pour réaliser les actifs solvables. Ces ventes réalisées dans l’urgence n’ont que faire des fondamentaux des sociétés cotées. Ce week-end le Journal des Finances titrait « Le pire est passé ». Il nous reste à voir l’efficacité de cette prédiction.

 

La planète financière plonge dans l'inconnu

Par Martine Orange

Mediapart.fr

Ce fut un de ces week-ends fous, un de ceux décisifs où se rebattent les cartes de la planète financière et donc de l'économie mondiale. Pendant trois jours, les banquiers centraux, les principaux banquiers du monde, les autorités américaines, sans relâche, se sont réunis pour tenter de sauver ce qui pouvait l'être de la planète financière. Au terme de ces longues discussions, le premier bilan est sanglant : la banque d'investissement Lehman Brothers est placée sous le régime de faillite, sa sœur jumelle Merrill Lynch est rachetée en catastrophe par Bank of America, American Insurance Group (AIG), le premier assureur mondial, demande un financement de 40 milliards de dollars en urgence à la Fed, pour tenter d'échapper à son tour au jeu de massacre.

Dès l'ouverture lundi matin des marchés européens, ces décisions ont déclenché la panique. Londres, Paris, Francfort décrochaient, perdant de 3 à 5%. Ce n'est pas tant la disparition de Lehman Brothers, laquelle semblait inévitable, qui inquiète, que ce que révèle ce qui s'est joué ce week-end. Un tournant important a été pris. Et les conséquences en paraissent immenses.

Tout provient d'un changement d'attitude majeur du gouvernement américain. Désormais celui-ci refuse d'apporter soutien et garantie illimitée, c'est-à-dire des fonds publics, au secteur financier. Depuis l'aide apportée par la Réserve fédérale au sauvetage de la banque Bear Stearns en mars, le monde financier se sentait rassuré : malgré tous les dangers qui se profilaient, le soutien des autorités monétaires et du Trésor américain lui semblait assuré. La nationalisation de fait des géants hypothécaires, Fannie Mae et Freddie Mac, la semaine dernière les avait confortés dans cette vue. Aussi, tous s'attendaient à ce le gouvernement américain vole encore une fois au secours de Lehman Brothers quand la crise s'est déclenchée.

Mais cette fois, leur espoir a été déçu. Lors d'une première réunion, vendredi soir, avec les principaux banquiers de Wall Street, Henry Paulson, secrétaire au Trésor américain, a fait savoir que l'Etat n'était pas décidé à mettre la main à la poche pour Lehman Brothers ou apporter sa garantie d'une manière ou d'une autre. Tout au long du week-end, Wall Street a tenté de peser pour faire revenir le gouvernement sur sa décision. En vain.

La fin d'une figure de proue de Wall Street

Des dizaines d'hypothèses furent imaginées pendant ces deux jours. Très vite, il apparut qu'aucun établissement bancaire n'était capable de reprendre seul la banque d'investissement, surtout si le gouvernement refusait son aide. On se proposa donc de la couper en deux. Une structure de défaisance devait reprendre la « mauvaise banque », les actifs liés aux produits hautement toxiques affectés par les "subprime", et autres produits dérivés nés du marché hypothécaire. La « bonne » banque, celle relative à la banque d'investissement, la gestion d'actifs, elle, serait rachetée par un établissement financier. Bank of America fut pressée de se porter candidate. Après examen du dossier, elle se désista, estimant qu'elle ne pouvait le faire sans garantie de l'Etat.

Tous les espoirs se portèrent alors sur le Britannique Barclay's. Celui-ci semblait prêt à reprendre Lehman. Mais il ne pouvait le faire dans les temps impartis : les autorités américaines voulaient que le dossier soit clos avant l'ouverture des bourses asiatiques lundi. La banque britannique ne pouvait aller si vite, devant soumettre le dossier à ses actionnaires et aux autorités de régulation britanniques au préalable. A en croire certaines sources citées par le New York Times, il semblerait aussi que les autorités de régulation financières britanniques aient usé de tout leur pouvoir pour dissuader la Barclay's de se lancer dans cette aventure. Dimanche soir, la banque anglaise annonçait son retrait.

Tous ont compris l'importance de la nouvelle : c'en était fini de Lehman Brothers. La quatrième banque d'investissement américaine, née d'une maison de courtage du coton à Montgomery (Alabama), devenue une des figures de proue de Wall Street depuis le XIXe au point d'être parmi les six membres fondateurs de la Réserve fédérale américaine, était morte. Lundi matin à la première heure, Lehman Brothers a annoncé s'être placé sous le régime des faillites.

Le sauvetage à l'arraché de Merril Lynch

Le monde financier a très vite compris qu'il lui fallait tirer les conséquences du changement de positionnement du gouvernement américain. Ne bénéficiant plus désormais de garantie étatique, il devait s'organiser pour faire face aux répercussions de la faillite de Lehman et de ses inévitables conséquences en chaîne. L'effondrement de la banque d'investissement risque d'entraîner une méfiance généralisée sur les établissements jugés les moins sûrs, nourrissant le cycle infernal du doute, de la raréfaction du crédit, du renchérissement des taux, des dégradations puis de l'écroulement. Et la première sur la liste était, de l'avis de tous, Merrill Lynch, la sœur jumelle de Lehman.

Pendant le week-end, le patron de Merrill Lynch, John Thain, ancien du New York Stock Exchange (la bourse de New York), rencontrait dans la plus grande discrétion le patron de Bank of America, Kenneth Lewis, pour discuter d'un plan de reprise. Dimanche soir, l'accord était conclu. Bank of America acceptait de racheter Merrill Lynch pour 50 milliards de dollars. La banque en valait plus du double, il y a un an. Mais la banque d'investissement n'avait plus le choix. Sans cet accord in extremis, elle était la prochaine victime désignée. De Merrill Lynch restera surtout, semble-t-il, son activité de gestion d'actifs et de fortune, appelée à fusionner avec celle de Bank of America.

Mais l'effondrement de Lehman risque de créer des dommages encore plus importants et qui ne seront pas que collatéraux. Un exemple, un seul mais qui pourrait se révéler mortel dans les mois à venir : toutes les banques, les assurances et les établissements financiers ont dans leur bilan des produits proches de ceux portés par Lehman. Personne ne sait plus la valeur de ces produits financiers : il n'y a plus de marché pour eux. Chacun a donc passé des dépréciations d'actifs plus ou moins importantes en fonction de son analyse des perspectives du marché, de ses possibilités financières aussi – toutes n'ayant pas des fonds propres extensibles. Demain, si les actifs de Lehman sont vendus aux enchères, à l'encan, le marché aura une valeur qui servira plus ou moins de référence. Et les banques devront bien en tenir compte pour l'établissement de leur bilan, ou expliquer pourquoi en cas contraire.

Société de secours mutuel

Sentant venir des lendemains difficiles, une dizaine de banques ont donc décidé, toujours ce week-end, de constituer une sorte de secours mutuel. Chacune participera à une caisse commune qui leur permettra de mobiliser des financements rapides en cas de besoin.

De son côté, la Réserve fédérale a assoupli à nouveau ses règles de financement pour venir en aide aux banquiers de Wall Street. Ce nouveau dispositif pourrait être mis à l'épreuve très rapidement. Selon le New York Times, l'assureur AIG a fait appel dès dimanche soir à la FED pour lui assurer un prêt court terme de 40 milliards de dollars pour l'aider à se refinancer. Le premier assureur mondial paraît avoir un besoin urgent de cet argent frais, les agences de notation menaçant d'abaisser sa note, donc d'augmenter son taux de financement, s'il ne levait pas des fonds dans la semaine. En parallèle, AIG a annoncé la vente en urgence de 20 milliards de dollars d'actifs. De leur côté, les autres banques centrales du G7 ont assuré, lundi matin, être prêtes à agir en cas de besoin. La banque du Japon dit "surveiller le marché de très près". La banque centrale européenne a déclaré être "prête à contribuer à des conditions ordonnées sur le marché monétaire en euros". Elle a déjà engagé une opération de liquidités exceptionnelle de 30 milliards d'euros.

Les premières lignes de défense ont été constituées. Des mesures de précaution ont été prises. Maintenant Wall Street croise les doigts. Mais aux premières heures de cette semaine décisive, tous ont le sentiment de plonger dans l'inconnu.



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